La Genèse de la GS

 

 

Citroën et les autres, avant la GS

 

Sous les verrières du Grand Palais parisien, à l'occasion du Salon de l'Auto, l'apparition publique de la Citroën DS fait l'effet d'une bombe. On n'a jamais vu autant d'audaces techniques rassemblées sur un même véhicule. Nous n'en ferons pas ici le catalogue : le sujet a été abondamment traité dans la presse spécialisée et autres publications traitant d'automobile.

Le public est immédiatement séduit : les bons de commandes affluent, avant même la fin de ce Salon 1955.

 

 

 

 

La DS en 1955

Ce qui est le moins innovant, dans la DS, c'est son moteur, largement hérité de sa non moins célèbre devancière. L'ingénieur Paul Magès ne désigne-t-il pas cet accessoire mécanique sous le nom peu flatteur de "tournebroche" ?

Cette devancière, chacun la connaît : la fameuse Traction, installée dans le paysage automobile français depuis 1934, et entrée dans la grande Histoire de notre pays. La Traction a participé, de gré ou de force, à des actes d'Occupation comme à des actes de Résistance : qualités routières hors du commun obligent …

Entre les deux dates que je viens d'évoquer, une autre Citroën célébrissime fait son apparition dans notre quotidien. Qui n'a pas, au moins une fois dans sa  vie, roulé en 2CV ? Une voiture très populaire imaginée dès 1936, mais dont la Seconde Guerre a différé l'apparition publique à 1948. Malgré une apparence quelque peu surannée dès son apparition, la 2CV est un énorme succès pour Citroën est reste à ce jour le modèle détenant deux records de la marque au double-chevron : la durée en période de production et le nombre d'exemplaires produits.

 Là encore, le secret de la réussite repose sur des solutions techniques concernant la suspension, la légèreté et la fiabilité. Ces deux dernières qualités doivent beaucoup au choix d'un moteur refroidi par air. Panhard a suivi la même démarche (la performance en plus) et outre-Rhin , une célèbre Coccinelle doit beaucoup de sa robustesse à ce même mode de refroidissement.

Coccinelle et 2CV assurent les beaux jours de leurs marques respectives, en ces années de prospérité retrouvée. Toutes deux donnent naissance à de nombreux dérivés qui amplifient leur succès.

 

Ainsi passent les années cinquante et soixante. Sur les routes de France, à cette époque, trois Citroën mythiques sont très présentes : la Traction, la 2CV et la DS. De nos jours, on peut même parler de trois icônes, dans l'univers de la voiture ancienne. Force est d'ailleurs de constater à quel point aujourd'hui elles sont présentes dans le moindre rassemblement d'anciennes toutes marques. De là à oser dire que Citroën est la marque automobile la plus collectionnée au monde, il n'y a qu'un pas.

Pendant ces vingt années d'après-guerre, le Bureau d'études du double-chevron connaît une activité intense, explorant à tout va une foule de solutions techniques qui finissent souvent dans l'oubli. Les ingénieurs sont créatifs et audacieux. C'en est au point que la clientèle essuie parfois les plâtres de solutions techniques qui auraient demandé un peu plus de mise au point : un travers apparu en 1934 avec la hâtive réalisation de la novatrice Traction (elle devra son salut à l'intervention de la famille Michelin dans le capital de Citroën).

Les années de la reconstruction voient donc le niveau de vie des Français et de leur voisins européens s'améliorer. Pendant que Citroën écoule suffisamment de ses petites et plus grosses cylindrées pour vivre, la demande se concentre sur les autos moyennes. Au milieu des années soixante, 70% du marché automobile hexagonal concerne les 6/7 cv fiscaux. A l'époque, ce sont les cylindrées moteur comprises entre 1000 et 1300 cc.

Dans cette catégorie moyenne, l'offre est abondante et les propositions techniques des constructeurs diverses. Chez nous, Renault, Peugeot et Simca sont passés à la traction. La même architecture est rapidement adoptée en Italie par Fiat, en gamme moyenne. En Allemagne, Opel et Ford restent fidèles à la propulsion, tout comme les marques nationales plus huppées. En Grande-Bretagne, la Mini est une auto révolutionnaire qui fera école, mais le reste de la production populaire ne brille pas par son modernisme.

 

 

Il faut vendre pour survivre

 

Et Citroën, dans tout ça ? Absent de l'offre en gamme moyenne … surtout après l'arrêt de production de la vaste et déclinante Panhard 17, en 1965, abandonnée par son nouveau propriétaire chevronné.

Pour sortir de cette impasse, au milieu des sixties, le Double-Chevron lance l'étude du projet F. 

 

Tout s'arrête en avril 1967, alors qu'on en était à la phase de l'industrialisation. Problèmes de coûts de production ? Ressemblance trop accentuée avec la nouvelle Renault 16 ?

 

Un peu des deux, peut-être ? Toujours est-il que le problème commercial de Citroën n'est pas solutionné.

Le temps presse, lorsque le patron Pierre Bercot, en 1968, remet ses ingénieurs et stylistes au travail. Il faut faire aboutir le projet G à l'automne 1970. Du projet F, on garde l'idée d'un moteur à plat refroidi par air, mais le Patron ne veut pas entendre parler d'un hayon (qui fait pourtant le succès des Renault 4, R6, R16 et autre Simca 1100).

 L'ingénieur Dupin s'occupe de la motorisation, tandis que deux équipes de style sont mises en compétition pour hâter le mouvement. Ainsi, le Centre de style maison (dirigé par Robert Opron) doit composer avec les propositions de l'Italien Giugiaro. Voici un extrait d'un témoignage direct. Robert Opron, en personne, s'exprime le 22 mars 2003. C'est le magazine Auto Passion qui publie, dans son hors série n°75 de mai-juin 2003 consacré à la Citroën GS.

 

 << Dans le cahier des charges, je me souviens qu'il était question de Cx et que celui-ci devait être le meilleur possible, car le moteur prévu n'était pas très puissant. Nous avons donc étudié ce qui allait devenir la GS, mais nous avons dû le faire dans des délais très courts. J'ai réalisé quelques croquis et maquettes et la direction de Citroën a demandé une autre étude, en parallèle, à Giugiaro. Finalement, ce que les Italiens ont pondu ne sera pas accepté par Citroën, et leur projet deviendra l'Alfasud.

Chez nous, c'est de Lassus qui a fait progresser l'étude en soufflerie, mais c'est l'ingénieur Dupin qui nous a sortis d'un problème inextricable.

 

 En effet, la hauteur de capot, idéale pour nous, n'était pas assez haute pour accueillir la véritable "Tour Eiffel" constituée du carburateur, de sa pipe et de son filtre, nécessaire au bon fonctionnement du moteur. Le tout, empilé verticalement sur le quatre cylindres à plat pour obtenir une carburation parfaite, nécessitait un bossage sur le capot. Dupin, donc, diagnostiqua que c'étaient des ultrasons qui perturbaient la carburation, et trouva le remède. Les ingénieurs purent réduire la hauteur des tubulures, et nous avons pu, en ôtant la bosse, pousser un soupir de soulagement.

   Quand la voiture est sortie, l'arrière a été critiqué, principalement par les gens de Citroën, mais la bévue est venue de Pierre Bercot lui-même qui ne voulait pas entendre parler de cinquième porte … qui sera de mise avec la GSA. Je me souviens que c'est Michel Harmand qui a eu l'idée du tambour qui constitue le compteur de vitesse, et que c'est Muratet qui a installé le pare-chocs arrière sur la porte de coffre. Enfin, personnellement, j'ai dû me battre avec Saint-Gobain pour faire réaliser des vitres galbées en grande série. >>

 

Plus Citroën que moi, tu meurs !

 

Chez Citroën, on a su fournir les efforts nécessaires, et les délais impartis sont finalement tenus.

 

La GS est bien au rendez-vous du Salon de l'Auto en 1970!

Auparavant, en août 1970, les concessionnaires reçoivent la première photo officielle de la GS 

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